Quand on croise Kolb et Tricot-Musial…

Après avoir assisté à plusieurs interventions de chercheurs qui ont insisté sur l’importance d’ancrer la formation des enseignants dans le réel, je me suis dit que c’était une voie à investiguer. Si je trouve l’idée très séduisante, la mise en pratique ne me semble pas évidente et j’ai voulu identifier des gestes professionnels du formateur pour faire vivre cette démarche.

1 – Le modèle de Kolb

L’approche de Kolb peut être un cadre structurant pour identifier les différents temps de la formation. Ce cycle qui se rapproche de la logique de l’amélioration continue donne un cadre pour l’enchaînement des étapes de la formation avec 4 temps distincts :

  1. Observation réflexive ;
  2. Conceptualisation abstraite ;
  3. Expérimentation active ;
  4. Expérience concrète.

2 – Le modèle de Tricot et Musial

André Tricot et Manuel Musial proposent un modèle qui met en exergue les processus mis en œuvre dans une phase d’apprentissage.

Ils ont identifié 6 processus (en bleu sur le schéma) qu’ils décrivent ainsi :

ProcessusDescription du processus
ConceptualisationÉlaboration d’un concept, connaissance stable d’un aspect du monde. Processus inductif fondé sur le repérage de traits communs, la catégorisation, et la mise en relation avec d’autres concepts.
CompréhensionÉlaboration d’une connaissance spécifique, issue de la confrontation d’une source aux connaissances de l’apprenant.
ProcéduralisationÉlaboration d’une connaissance procédurale. Il se décompose en trois étapes : Reconnaître les connaissances utile à la résolution d’une situation problème ; associer la solution à la situation ; créer des règles d’appariement entre une condition et une action.
AutomatisationTransformation d’une méthode ou d’un savoir-faire en automatisme
MémorisationÉlaboration d’une trace littérale en mémoire. Elle dépend de la fréquence de son utilisation
Prise de conscienceÉlaboration d’une connaissance déclarative de quelque chose que l’on sait faire. Ce processus est soutenu par l’analyse de l’action et l’explicitation.

Ce modèle est présenté ici https://blogs.univ-tlse2.fr/ip3a/theorie-ip-des-3-actes/ (nouvel onglet)

3 – Intégration des deux modèles

Ces deux modèles me semblent complémentaires. En effet, l’un présente une démarche générale structurante quand l’autre apporte un éclairage sur les processus mis en œuvre par l’apprenant et que le formateur (ou l’enseignant) doit soutenir. Ainsi, on pourrait le présenter comme suit :

Etape de KolbProcessus de Musial et TricotStratégies utilisables en formation
Observation réflexivePrise de conscience CompréhensionAnalyse de traces du réel
Confrontation avec les pratiques des participants
Conceptualisation abstraiteConceptualisationSynthèse d’échanges, structuration,  mise en perspective.
Apports de la recherche
Expérimentation activeProcéduralisationAide à la transposition, Appropriation d’outils,
Partage d‘expériences entre pairs
Expérience concrèteProcéduralisationPratique en classe,
Visite croisée
 Automatisation MémorisationAccompagnement dans la durée

une version graphique de ce tableau pourrait se présenter comme suit :

En conclusion

Ce travail est tout frais, il « sent encore la peinture » 😉 … Il permet d’identifier des stratégies utilisables en formation, de caractériser comment elles peuvent être pertinentes, de les mettre en perspective les unes par rapport aux autres. Voilà une base qui devrait être utile pour planifier de prochaines actions de formation de formateurs…

En fait, ce billet s’apparente à appel à réactions. Il serait, par exemple, intéressant de préciser la liste et la catégorisation des stratégies envisageables en formation. Apportez votre point de vue, des évolutions, des adaptations, que nous puissions avancer ensemble !

ChatGPT et l’enseignement supérieur, un rapport de l’UNESCO

L’UNESCO a publié un document intéressant sur ChatGPT et les IA génératives et leur impact sur l’enseignement supérieur. Des éléments me semblent très intéressants.

1 – Les rôles que l’on peut donner à une IA en formation

On trouve page 9 un tableau récapitulant différents rôles que l’on peut donner aux IA génératives en formation, en voici une version traduite …

  • Un moteur de formulation : utiliser la fonction « régénérer » pour produire des formulations différentes d’une même idée et comparer les différentes alternatives.
  • Un débatteur opposant : utiliser l’IA comme un débatteur afin de se préparer à une discussion. L’IA peut réfuter les arguments présentés ou proposer des contre-arguments.
  • Un support pour la collaboration : L’IA peut être utilisée comme outl de base pour un travail collaboratif, aussi bien pour trouver des informations que pour construire un début de solution au problème posé.
  • Un moteur d’étayage : l’enseignant peut utiliser l’IA pour générer du contenu, des consignes et des conseils pour soutenir les apprentissages des étudiants.
  • Un tuteur personnel : l’IA peut apporter une rétroaction instantanée aux contributions des étudiants.
  • Un co-designer de formation : l’IA peut être utilisée pour planifier, organiser, concevoir, retravailler une formation.
  • Un exploratorium : l’IA peut permettre de mener des activités créatives de recherche à partir de quelques informations proposées. Cet exercice peut être utilisé pour le développement des compétences en communication.
  • Un pair : expliquer son niveau de maîtrise d’un sujet à l’IA et lui demander de nous aider à mettre en place une stratégie pour progresser sur le sujet.
  • Un stimulateur : utiliser l’IA pour générer des activités stimulantes (quiz, exercices, ..) pour stimuler l’apprentissage.
  • Un évaluateur instantané : Après une phase de travail avec l’IA, l’étudiant demande une rétroaction synthétique de la séance à l’IA pour la partager avec son enseignant.

2 – Les questions éthiques

Par la suite, le rapport présente les principales questions éthiques liées à l’usage de telles technologies dans l’enseignement supérieur. La première est, sans surprise, la question du plagiat dans les productions des étudiants, mais aussi l’absence de régulation de ces outils. De même, la présence de biais cognitifs et les risques de discrimination. Sont aussi abordées les questions d’accessibilité et des enjeux commerciaux liés à ces outils.

3 – Des stratégies d’adaptation

Plusieurs pistes sont proposées pour engager les institutions dans un processus d’évolution / adaptation :

  • Initier des temps de discussion autour de ces IA ;
  • Co-construire une charte des usages de ces IA avec toute la communauté éducative (administratifs, enseignants, étudiants) ;
  • Faire le lien entre les IA génératives et les apprentissages visés pour expliquer les attentes et les modalités d’usage ;
  • Revoir les modalités d’évaluation ;
  • Intégrer les usages des IA dans la politique d’honnêteté et d’intégrité de l’institution ;
  • Accompagner tous les acteurs dans leurs usages des IA génératives, spécifiquement pour la rédaction de commandes (prompt)

En conclusion

Personnellement, je trouve que l’arrivée de ChatGPT et des intelligences artificielles est un vrai sujet d’étude et je suis frappé de voir comme nombre de commandes (ou prompts) qu’on lui soumet seraient d’excellents sujets de travail collectif entre pairs, que ce soit pour concevoir une formation, envisager différentes formulations d’une même idée, penser l’étayage ou concevoir des activités ludiques… Toutes ces demandes sont de formidables occasions de travailler en équipe et d’apprendre collectivement. Une telle stratégie nécessite un temps certain comparé à l’instantanéité des réponses de la machine, mais elle permet un réel développement des compétences de l’ensemble des participants.

Ce rapport me semble intéressant par le balisage du sujet qu’il apporte, les questions qu’il soulève et les pistes de travail qu’il propose. Maintenant, il reste encore à voir comment les différentes institutions peuvent s’en emparer…

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Engager les participants dans une formation

On m’a récemment demandé d’intervenir pour présenter l’apprentissage expérientiel à des formateurs du 1er degré. Je vous propose ci-dessous un retour sur cette intervention en présentant le contexte, le déroulé et le fruit des échanges. Un très bon moment d’animation, stimulant et riche.

1 – Le contexte de la formation

Si l’on veut qu’une telle intervention soit utile, il me semble essentiel qu’elle s’ancre dans le quotidien professionnel des participants. Tous les participants sont animateurs d’au moins une constellation du plan français du 1er degré. Ces constellations sont des groupes d’une petite dizaine d’enseignants qui se retrouvent 5 à 6 fois par an pour travailler ensemble sur une difficulté partagée dans l’enseignement du français, dans une logique de lesson study. Ce concept est présenté ici et se déroule en 6 étapes :

  1. Choix du sujet d’enseignement ;
  2. Étude de ce sujet ;
  3. Planification ;
  4. Mise en œuvre et observation ;
  5. Débriefing ;
  6. Diffusion.

En amont de la rencontre, j’avais travaillé avec les organisatrices pour identifier les « points de blocage » que rencontrent les participants afin d’être au plus proche du réel. Il est vite apparu que l’engagement des participants dans le dispositif était une difficulté récurrente et que cela pouvait être un bon « cas d’étude » pour notre demi-journée.

2 – L’apprentissage expérientiel

L’apprentissage expérientiel a été conceptualisé par David Kolb et peut se présenter comme suit.

Il faut noter que la phase d’analyse est une relecture de ce qui s’est passé alors que la phase de généralisation est la confrontation avec d’autres points de vue : ce que dit la recherche, des échanges entre pairs, …On peut tout de suite remarquer le lien fort entre cette stratégie d’apprentissage et les lesson studies.

La vidéo ci-dessous présente ma vision des choses sur l’intérêt et la mise en œuvre en classe et dans une logique d’apprentissage tout au long de la vie.

Ainsi, le sujet de travail pour cette demi-journée était « l’engagement des participants dans une formation de type constellation » et la forme suivait la démarche de l’apprentissage expérientiel. Nous avons alterné des temps en petits groupes (pour chaque question) et des temps de synthèse collective pour capitaliser les contributions de chaque groupe et permettre quelques réactions.

3 – Première partie : le point de vue du formateur

a) Quels comportements permettent d’identifier ce comportement négatif ?

Il est important d’être vigilent à ces différents signes pour pouvoir s’ajuster au plus vite et adopter la posture qui nous semble la plus adaptée. Voici donc une liste des signes identifiés : bras croisés, utilisation du téléphone, éléments de discours, silence, autres occupation (correction de copies, de cahiers), absence, retard, départ anticipé, manteau conservé, pas de prise de note, pas de regard, retrait  »physique’ par rapport au groupe, humour déplacé, résistance à la démarche (« je veux des conférences de chercheurs »), soupirs, lever les yeux au ciel, changement de sujet (avec un sujet périphérique qui devient principal), discours contre l’institution, bavardage, regroupement physique des réticents.

remarque : Les différentes listes présentées dans cet article ne visent pas l’exhaustivité, ce sont les contributions des participants. Celle-ci permet quand-même de repérer un bon nombre d’éléments d’alerte.

b) Comment je me suis senti ?

Ces éléments d’alerte ne sont pas qu’externes, on peut aussi en ressentir intérieurement, ils sont aussi à identifier. Je me suis senti : agressé, diminué, vexé, isolé, en alerte, irrité, en colère, remis en question dans ma professionnalité, visé personnellement, déstabilisé, démuni, interrogatif, résigné, compréhensif, stimulé, challengé, partagé (partir ou rester ?).

Il me semble particulièrement intéressant de repérer que si les formateurs se sentent majoritairement blessés et agressés, il est aussi possible de s’appuyer sur ces réactions pour en tirer de l’énergie (stimulation, challenge).

La verbalisation de ces différentes émotions devrait permettre d’y être plus attentif une prochaine fois, de mieux les identifier et, si possible, retourner cette énergie en positif.

c) Comment j’ai réagi ?

Il est maintenant temps de partager comment chacun a réagi dans cette situation. Cela permet, personnellement, de clore la phase d’analyse et, collectivement, d’engager la phase de généralisation.

  • S’appuyer sur son capital sympathie ;
  • Feindre l’indifférence ;
  • Chercher dans ma « bibliothèque de stratégies » ;
  • Poser un cadre clair au départ, logique de contrat par rapport aux attitudes indésirables (manger, téléphone, …) ;
  • S’appuyer sur l’humour ;
  • Lâcher prise : prendre le temps avant de juger, compréhension, écouter le groupe ;
  • Prendre des notes pendant les échanges pour rebondir sur ce qu’ils disent et les valoriser ;
  • Aller dans du contenu pour gagner en légitimité. Cela nécessite d’être confiant dans les apports que l’on va faire qui doivent être solides, penser à nourrir le groupe ;
  • Créer les conditions de l’écoute.

On peut classer ces différentes modalités d’action en 2 catégories : d’une part, celles qui peuvent être anticipées et qui vont permettre de poser un cadre, de créer les conditions de l’écoute ; et d’autre part, celles qui se décident dans l’instant et que l’on va choisir dans notre bibliothèque de stratégies. La phase de transfert correspond ainsi à la préparation de tout ce qui semble pertinent d’anticiper et de se construire ce catalogue de stratégies, à choisir « au débotté ».

4 – Deuxième partie : le point de vue du participant

a) Quels sont les freins ?

Nous abordons maintenant le même sujet en changeant de point de vue. Cela nous permettra d’adopter un autre cheminement, complémentaire au précédent. Les freins identifiés chez les participants sont importants à identifier pour pouvoir les anticiper. Voici ceux que nous avons répertoriés : Les préoccupations extérieures à la constellation / au travail, les horaires, le lieu, le sentiment du travail non reconnu (cela vient se surajouter à tout le reste), les résistances à l’égard de l’institution, le contenu ‘imposé’ (Français ou Maths et pas climat scolaire ou différenciation, …) la peur de s’exposer au groupe, peur des visites croisées, peur de travailler ensemble, en équipe, l’ancienneté de la personne, le côté infantilisant de la formation, les désaccords entre pairs, le mauvais feeling avec le formateur, avec ‘leur histoire de formation’, l’image du conseiller pédagogique perçu comme l’œil de Moscou, la disponibilité intellectuelle (charge mentale) après une journée de classe, les formations sur temps scolaire sont ‘plus porteuses’, la posture du directeur qui n’a pas été pensée dans la constellation, les visites croisées imposées, la question du remplacement.

Comme on peut le constater, cette étape d’analyse permet d’identifier de multiples freins et le formateur n’a malheureusement pas prise sur tous…

b) Comment rassurer et donner envie de s’engager ?

Après avoir identifié les freins, il va falloir chercher à les lever. Voici les propositions qui sont sorties des différents groupes lors de cette phase de généralisation :

  • Être explicite sur le cadre, les attentes, les rôles, que le contrat soit clair.
  • Anticiper sur ce que l’on va donner comme contenu, sur ce qu’on va faire la fois suivante, rappeler par un mail, envoyer des bilans, utiliser des outils numériques pour documenter, capitaliser, …
  • L’idée de contrat est primordiale : tout le monde est engagé (droits et devoirs).
  • Recueil des besoins des enseignants sur leurs attentes.
  • Montrer l’intérêt de la constellation : prendre le temps pour construire sur un point bien précis.
  • Le temps long qui peut paraître un frein est mis à profit pour construire dans la durée. C’est profitable.
  • Penser la différenciation entre les collègues (niveau d’expertise) pour que tout le monde y trouve son compte : ancien maître formateur qui est associé (pour son expertise), content de partager ce qu’il savait, content d’observer des enseignants experts. Un réel point d’appui pour mettre en valeur les geste pro des enseignants.
  • Penser le matériel comme indicateur de ce qui va se passer (c’est rassurant).
  • Penser l’enrôlement du directeur.
  • Le formateur mène la première séance de visite croisée pour libérer les participants.
  • Le cadre est présent mais il offre une certaine liberté ! Choix de ce qui va être mis en œuvre, dans l’organisation, …
  • Logique de co-construction : impliquer tous les participants dans un travail collectif, une dynamique de groupe.
  • Prendre les notes pour donner des bonnes conditions, montrer le sérieux du formateur pour libérer les participants des aspects matériels.

La grande majorité des pistes proposées touchent au cadre que le formateur met en place, aussi bien au niveau de l’organisation matérielle et temporelle que sur la prise en compte des réalités de chaque participant.

c) Que mettre en place ?

L’objectif est maintenant d’identifier ce que l’on peut mettre en place concrètement pour formaliser ce cadre. Il était prévu de travailler sur une charte de la constellation mais nous n’avons malheureusement pas pu mener ce dernier temps… Les organisatrices de la rencontre devraient pouvoir organiser un temps de travail en ce sens ultérieurement.

Il était aussi possible de travailler sur les observations croisées en identifiant des observables intéressants et mettre en place des grilles d’observation.

5 – Des éléments complémentaires

Durant chaque temps de travail en groupe, il était proposé à un participant d’être observateur. Nous prenions 2 minutes ensemble pour identifier un objet d’observation : l’ambiance générale, l’organisation de la prise de parole, l’écoute, la prise de note, … L’observateur faisait un petit compte-rendu à la fin du temps de travail.

Deux participantes m’ont interpelé sur le vocabulaire que j’utilisais qui était plus du domaine affectif que professionnel (« rassurer » plutôt que « sécuriser »). Je trouve cette remarque très pertinente. Je ne fais pas toujours attention au vocabulaire que j’utilise et j’apprécie ce retour précis et professionnel. Il va falloir que j’y veille pour mes prochaines interventions.

Enfin, j’ai repris une idée de François Muller en proposant qu’une personne note « les 10 bonnes idées » identifiées lors de cette demi-journée. Les voici :

  1. Mettre en place un contrat de communication ;
  2. Pour une mise en commun « démocratique » : une idée par groupe, pour permettre à tous les groupes d’échanger en respectant les tours de parole
  3. Bluffer : des formateurs qui font croire aux enseignants qu’ils sont « engagés » (par exemple : tout le monde a répondu au questionnaire ou partager des expériences de classe non vécues)
  4. Poser des observateurs avec une focale
  5. Laisser aller l’atmosphère, d’une certaine manière, lâcher prise sur la forme de l’animation
  6. Après la collecte, le formateur qui souligne des points importants (les mots en gras dans le texte de cet articles). Cela renvoie au groupe un éclairage, redynamise
  7. Chercher en individuel puis collectif
  8. Donner des rôles dédiés aux réfractaires
  9. Garder les bonnes idées
  10. Soutenir le discours avec des images : ça peut apporter de l’humour, de la provocation, de la poésie…

Voilà, vous savez tout sur cette intervention qui fut un réel plaisir à animer, tant le groupe était enthousiaste, dynamique et pertinent.
Merci Stéphanie et Yasmina de m’avoir fait signe, à une prochaine fois !

Un peu de recul sur ChatGPT

Comme beaucoup de monde, j’ai testé ChatGPT en lui posant des questions sur les limites de son utilisation et l’usage avec des élèves (Vous trouverez le contenu des échanges à la fin de cet article). Si le résultat est impressionnant, quelques éléments m’interpellent…

1 – ChatGPT ne produit que ce qu’on lui demande

Force est de constater que cette intelligence artificielle produit des textes impressionnants. Cependant, elle ne demande pas de préciser ou de contextualiser une requête qui pourrait être floue et répond par principe. Ce fonctionnement a deux conséquences :

  1. On n’est pas dans un dialogue d’égal à égal mais plutôt dans une position d’interview où l’on demande au ‘sachant’ de nous donner l’information souhaitée. Ce décalage met, d’une certaine façon, le demandeur en position d’infériorité alors qu’il doit avoir un esprit critique aiguisé pour analyser et traiter la réponse fournie par l’IA.
  2. Il faut espérer que notre question correspond exactement à ce que l’on cherche, et l’on sait à quel point c’est compliqué de poser la bonne question. ChatGPT le dit lui-même dans ses limites (cf. ci-dessous) : « Manque de compréhension du contexte : ChatGPT ne peut pas comprendre le contexte dans lequel une question est posée, ce qui peut parfois conduire à des réponses inappropriées ou confuses. »

Je n’ai pas cherché à pousser un questionnement trop précis et je trouve que la réponse est vite approximative, et d’ailleurs, ChatGPT le dit lui-même, « bien que ChatGPT puisse fournir des réponses assez précises, il peut encore commettre des erreurs ou produire des réponses inexactes. » Ainsi, j’aurais tendance à dire que ChatGPT est, au mieux, du niveau d’un collègue un peu baratineur et pas forcément très scrupuleux…

2 – ChatGPT n’est pas un collègue

Il me semble essentiel de rappeler que cette IA n’est pas un collègue et que les échanges que l’on peut avoir avec elle n’apportent aucune satisfaction sociale. On ne ressent aucune empathie pour cet interlocuteur, on ne tisse pas de lien dans la durée. ChatGPT ne va jamais nous raconter ses vacances ou ses problèmes, alors que c’est ce genre de partages qui aident à créer une réelle relation empathique. Nous sortons d’une pandémie qui nous a bien fait sentir que nous avions un besoin essentiel de ces relations humaines, de ces échanges informels, de ces relations qui se façonnent au jour le jour. Il ne faudrait pas tomber dans le piège de cette IA, sorte de ‘Canada dry’ de la relation : ça ressemble à une relation, mais ça n’est pas une relation, et c’est pour ça que ça pose problème …

ChatGPT est d’ailleurs honnête à ce sujet puisqu’il annonce que « ChatGPT n’est pas un être humain, il ne peut pas remplacer une relation humaine et un accompagnement personnalisé. Il ne peut pas prendre en compte tous les aspects d’une situation et peut avoir des biais en fonction des données qu’il a appris. »

Si l’on reprend le décalage de positionnement abordé ci-dessus, couplé avec cette apparence de la relation, on voit rapidement poindre le risque d’une manipulation systématique où l’algorithme nous prescrirait nos choix, comme le dit Eric Sadin dans cette vidéo :

Le point de vue de Eric Sadin sur Chat GPT

3 – ChatGPT risque de nous inciter à la paresse

Que c’est facile de poser une question et d’avoir une réponse qui tombe, toute cuite, prête à digérer !

En contrepoint, on se rappelle que Michel Serres disait « les nouvelles technologies nous ont condamnés à devenir intelligents ! »

Effectivement, les différents défis auxquels notre monde est confronté ne pourront pas se résoudre si la population est paresseuse et se contente de réponses prémâchées. Nous avons besoin de personnes engagées, créatives, critiques (au sens de l’esprit critique) et il va donc nous falloir tous développer ces compétences et attitudes de plus en plus essentielles.

4 – ChatGPT pose des questions économiques et écologiques

Même si le travail est facilité pour nous, humains, il est quand même fait et cela nécessite une énergie certaine. A ce sujet, Reuters a publié une étude qui analyse le coût des requêtes sur de tels outils (rapporté par 01net) et les chiffres sont éloquents : « John Hennessy, le président d’Alphabet (la maison mère de Google), a indiqué qu’un échange avec un modèle de langage comme ChatGPT avait probablement un coût dix fois supérieur à celui d’une recherche classique avec de simples mots-clés. » Ce coût se transforme instantanément en énergie consommée et l’impact climatique est très direct !

Peut-être avons-nous intérêt à être intelligent, à travailler en bonne intelligence pour croiser nos compétences et nos points de vue pour relever les défis auxquels nous sommes confrontés ?

5 – Comment développer les compétences nécessaires chez des élèves ?

Voici une réponse, toute personnelle, qui prolonge la proposition d’initiation proposée par ChatGPT (cf. ci-dessous)

  1. Demander aux élèves, en groupe, de formuler une problématique sur un sujet donné, sous forme de question.
  2. Soumettre cette problématique à ChatGPT en lui demandant une réponse en 500 mots et avec au moins 5 références (avec bibliographie)
  3. Retravailler la réponse : vérifier les références, chercher d’autres références, identifier les influences que le choix de références induit, …
  4. Rédiger tout cela avec un traitement de texte en utilisant le suivi des modifications ou un pad. Cela permet d’avoir en même temps la proposition d’origine la production finale.
  5. Expliciter le cheminement et analyser l’écart entre les deux textes.

Ce qui me semble le plus important dans ce travail ce n’est pas la production finale mais bien le cheminement intégré par les élèves, l’écart entre les deux textes et l’analyse qu’ils en font. Ainsi, ce qu’il faut évaluer dans le travail d’un élève, c’est de moins en moins la production et de plus en plus le processus mis en œuvre et le regard qu’il porte sur son travail (analyse critique de la démarche, de la production, ce qu’il retient si c’était à refaire, …)

6 – En conclusion

Ces outils arrivent dans notre société et il me semble important de les intégrer à notre réflexion sur l’éducation et les apprentissages. Ils nous incitent de plus en plus à centrer notre travail d’éducateur (au sens le plus large) sur des compétences de très haut niveau, en commençant par l’esprit critique : Quand ai-je besoin d’utiliser ces outils ? Quel est l’impact de cette utilisation ? Quelle est la qualité de leurs productions ? Comment les utiliser de manière optimale et juste nécessaire ?

L’ordinateur ne fait que ce qu’on lui demande, et si l’on veut utiliser ChatGPT à bon escient, on a intérêt à bien travailler notre questionnement pour être pertinent. Comme le disait Einstein, « Si j’avais une heure pour résoudre un problème, je passerais 55 minutes à réfléchir au problème et 5 minutes à réfléchir aux solutions »

7 – Les traces des échanges avec ChatGPT

Vous trouverez ci-dessous l’exhaustivité des traces des échanges mentionnés tout au long de l’article.

Quelles sont les limites d’utilisation de ChatGPT ?

Bien que ChatGPT soit un modèle de langage impressionnant, il y a plusieurs limites à son utilisation. En voici quelques-unes :

  1. Précision limitée : Bien que ChatGPT puisse fournir des réponses assez précises, il peut encore commettre des erreurs ou produire des réponses inexactes.
  2. Manque de compréhension du contexte : ChatGPT ne peut pas comprendre le contexte dans lequel une question est posée, ce qui peut parfois conduire à des réponses inappropriées ou confuses.
  3. Incohérence : ChatGPT peut parfois produire des réponses qui manquent de cohérence ou qui sont contradictoires.
  4. Biais : Comme tout modèle de langage entraîné sur des données, ChatGPT peut avoir des biais implicites qui se reflètent dans ses réponses.
  5. Connaissances limitées : ChatGPT a des connaissances limitées à ce qui a été inclus dans son entraînement, ce qui peut limiter sa capacité à répondre à des questions en dehors de ce domaine.
  6. Incapacité à effectuer des tâches complexes : ChatGPT est capable de répondre à des questions simples et de mener des conversations de base, mais il ne peut pas effectuer des tâches complexes nécessitant des compétences spécialisées ou une analyse approfondie.

Il est important de prendre en compte ces limites et de ne pas surévaluer les capacités de ChatGPT. Cependant, en étant conscient de ces limites et en utilisant ChatGPT de manière judicieuse, il peut être un outil utile pour répondre à des questions et mener des conversations de base.

Quelles précautions faut-il prendre pour utiliser ChatGPT à bon escient ?

Voici quelques précautions à prendre pour utiliser ChatGPT à bon escient :

  1. ChatGPT n’est pas un être humain, il ne peut pas remplacer une relation humaine et un accompagnement personnalisé. Il ne peut pas prendre en compte tous les aspects d’une situation et peut avoir des biais en fonction des données qu’il a appris.
  2. ChatGPT est un modèle de langage qui fonctionne en se basant sur les données qu’il a appris. Il peut donc donner des réponses erronées si les données qu’il a appris sont incorrectes ou incomplètes.
  3. Il est important de poser des questions claires et précises à ChatGPT pour obtenir des réponses pertinentes. Les questions ambiguës ou vagues peuvent donner des réponses imprécises ou inutiles.
  4. ChatGPT est entraîné sur une grande quantité de données, y compris des données sensibles. Il est donc important de respecter la confidentialité et la vie privée des personnes concernées lors de l’utilisation de ChatGPT.
  5. Enfin, il est important de garder à l’esprit que ChatGPT ne doit pas être utilisé pour remplacer les services professionnels ou médicaux. Si vous avez des problèmes de santé mentale ou physique, il est important de consulter un professionnel qualifié.

Quels conseils donnerais-tu à un élève qui veut utiliser ChatGPT pour faire un devoir ?

Voici quelques conseils que je pourrais donner à un élève qui souhaite utiliser ChatGPT pour faire un devoir :

  1. Utilisez ChatGPT comme un outil de recherche supplémentaire. Bien que ChatGPT puisse fournir des réponses intéressantes, il ne doit pas être considéré comme la seule source d’informations pour un devoir.
  2. Posez des questions précises et claires. Plus la question est spécifique, plus la réponse de ChatGPT sera précise. Évitez les questions ambiguës ou vagues.
  3. Vérifiez les sources des informations fournies par ChatGPT. Bien que ChatGPT puisse fournir des informations pertinentes, il est important de vérifier la fiabilité des sources citées et de les vérifier auprès de sources alternatives.
  4. Ne plagiez pas les réponses fournies par ChatGPT. Si vous utilisez les informations trouvées grâce à ChatGPT, assurez-vous de les paraphraser et de les citer correctement.
  5. Utilisez ChatGPT pour obtenir de l’inspiration, mais ne comptez pas uniquement sur lui. Utilisez votre propre créativité et réflexion pour développer vos idées et vos réponses.

En somme, l’utilisation de ChatGPT peut être utile pour aider à faire des recherches et trouver des informations, mais il est important de l’utiliser de manière responsable et éthique.

Tu es enseignant et tu souhaites initier une classe d’élèves de 16 ans à l’usage de ChatGPT. Proposes une série de 5 activités progressives pour prendre en main l’outil et comprendre les limites d’utilisation. Pour chaque activité, tu préciseras la consigne donnée aux élèves et les points de vigilances sur lequel l’enseignant doit insister. Tu présenteras le résultat sous forme de tableau : activité, consigne, points de vigilance.

Voici une proposition de 5 activités progressives pour initier une classe d’élèves de 16 ans à l’usage de ChatGPT :

ActivitéConsignePoints de vigilance
1. Découvrir ChatGPTFaire une recherche sur ChatGPT et lire les informations disponibles sur le site officiel d’OpenAI.– Insister sur le fait que ChatGPT est une intelligence artificielle et non une personne réelle. – Expliquer les différences entre l’IA et les humains. – Mettre en garde contre les limitations de l’outil et les erreurs possibles.
2. Pose de questions simplesPoser des questions simples à ChatGPT et évaluer les réponses. Par exemple : « Quel est le nom du plus haut sommet du monde ? », « Qui a écrit le roman ‘Les Misérables’ ? », etc.– Insister sur le fait que ChatGPT ne peut donner que des réponses basées sur des informations existantes dans sa base de données. – Encourager les élèves à poser des questions simples et à évaluer la pertinence des réponses.
3. Pose de questions plus complexesPoser des questions plus complexes à ChatGPT et évaluer les réponses. Par exemple : « Quelle est la différence entre un virus et une bactérie ? », « Comment peut-on réduire l’impact du réchauffement climatique ? », etc.– Insister sur le fait que ChatGPT peut parfois donner des réponses erronées ou imprécises. – Encourager les élèves à poser des questions plus complexes et à évaluer la pertinence des réponses.
4. Création d’un dialogueÉcrire un dialogue avec ChatGPT sur un sujet donné (par exemple, l’environnement, les réseaux sociaux, la vie privée, etc.) et évaluer la qualité du dialogue.– Insister sur l’importance de poser des questions précises et de donner des informations claires pour obtenir des réponses pertinentes. – Encourager les élèves à évaluer la qualité du dialogue en fonction de la pertinence des réponses et de la fluidité du dialogue.
5. Analyse critique de ChatGPTAnalyser de manière critique l’utilisation de ChatGPT dans la vie quotidienne, ses avantages et ses limites. Par exemple : Comment ChatGPT peut-il aider les personnes en situation de handicap ? Quelles sont les limites de l’utilisation de ChatGPT dans le domaine de la santé ?– Insister sur l’importance de la réflexion critique sur les avantages et les limites de l’utilisation de ChatGPT. – Encourager les élèves à prendre en compte les enjeux éthiques, sociaux et environnementaux de l’utilisation de l’outil.

Il est important de rappeler aux élèves que ChatGPT est un outil et qu’il ne remplace pas les compétences humaines, telles que la créativité, le jugement critique et l’empathie. Il est également important de souligner que l’utilisation de ChatGPT doit être encadrée par des adultes responsables et formés à l’utilisation de l’IA.

Les pratiques collaboratives au service de apprentissages

L’inspection générale vient de sortir un rapport sur les pratiques collaboratives qui semble en phase avec les démarches et valeurs portées par ce blog depuis plus de 15 ans … réjouissons-nous ! Il est accessible ici

Voici la liste des préconisations pour développer les pratiques collaboratives de manière efficace et durable.

Recommandation n° 1, à destination des enseignants

En s’appuyant sur la recherche et la formation (notamment entre pairs), professionnaliser dans sa classe l’organisation des apprentissages coopératifs :

  • choisir des moments opportuns centrés sur les notions à acquérir ;
  • mettre en place des activités, des projets et des modalités de travail rigoureusement structurés, de l’amont à l’aval ;
  • mettre en place des modalités de travail fondées sur l’interdépendance positive, visant l’engagement actif de chacun et une interaction fructueuse ;
  • développer les habiletés coopératives des élèves ;
  • expliciter les apprentissages aux élèves, en amont et en aval.

Recommandation n° 2, à destination des chefs d’établissement et des équipes de direction

2.a. Faciliter, structurer et organiser les pratiques collaboratives au service des apprentissages entre enseignants :

  • organiser des temps d’échange collaboratifs entre pairs en réservant des temps spécifiques dans les emplois du temps ;
  • passer du partage informel d’informations à la mise en œuvre collective animée et organisée en :
    • faisant prendre conscience des limites des organisations informelles,
    • structurant la circulation de l’information par des outils adaptés,
    • mobilisant et clarifiant l’usage dédié du numérique (ENT, plateformes collaboratives…).

2.b. Faire connaître les retombées positives des pratiques collaboratives sur le bien-être à l’école et les apprentissages des élèves :

  • identifier, reconnaître et valoriser les compétences acquises lors de projets collaboratifs : se saisir des documents existant dédiés à l’évaluation (bulletin, livret de compétences, etc.) et de ceux accompagnant les parcours éducatifs (portfolios du PEAC, fiche avenir, etc.) ;
  • informer les parents sur les pratiques coopératives, les associer aux projets de l’unité éducative et les intégrer à certaines actions.

Recommandation n° 3, à destination des autorités académiques et nationales

3.a. Former à et par la coopération de la formation initiale à la formation continue, en lien avec la recherche :

  • inscrire des temps collaboratifs de formation dans les formations des professeurs stagiaires et les former au travail coopératif ;
  • développer la formation continue entre pairs (de type lesson studies, « constellations », communauté d’apprentissage…) ;
  • renforcer les liaisons inter degrés autour de la question des pratiques collaboratives afin d’éviter les ruptures ;
  • former les professeurs à varier les démarches pédagogiques en les sensibilisant au rôle de l’interaction et des compétences socio-comportementales dans les apprentissages.

3.b. Faciliter et encourager le développement du travail collaboratif dans les écoles et les établissements :

  • renforcer l’action des cellules « bâti scolaire » des académies, notamment par la production de ressources documentaires sur les agencements d’espaces favorables aux pratiques collaboratives ;
  • impliquer les référents numériques et la délégation académique au numérique éducatif pour aider les équipes éducatives à la recherche de solutions numériques facilement accessibles, techniquement légères, rapidement efficaces ;
  • accompagner une dynamique académique de proximité autour des pratiques collaboratives : développer un réseau de professeurs ressources ou de référents ;
  • intégrer un état des lieux explicite du travail collaboratif des équipes dans les étapes du processus d’évaluation des établissements.

Ce que Prodageo peut apporter au débat …

Il est très positif que ces questions soient abordées, débattues et portées au niveau national. Voici une recension d’articles de ce blog en lien avec ces propositions :

Affaire à suivre …

pédagogie ouverte

Des traces d’apprentissage

Dans le cadre de mon activité, nous nous questionnons sur l’attestation des formations que nous proposons. Après échange avec quelques formateurs, nous avons identifié plusieurs usages différents de ces attestations par les participants allant de la justification de présence à la trace d’apprentissage. Il me semble ainsi intéressant d’identifier la variété de ces traces d’apprentissages. Pour cela je me suis appuyé sur le document « Compétences de médecine générale et traces d’apprentissages – Mode d’emploi à l’usage des internes, maîtres de stages et tuteurs » qui est contextualisé pour la formation des internes en médecine. Le décalage entre la médecine et la formation m’a paru intéressant pour mettre en relief ce qui tient du métier et ce qui tient de l’apprentissage Voici donc quelques traces identifiées, et recontextualisées dans le cadre de la formation d’enseignants.

1 – Le récit de situation complexe

C’est un récit descriptif et analytique d’une situation professionnelle vécue, ‘authentique’ et ‘complexe’. Il est complété par une analyse de la situation, les questions induites, les réponses apportées et l’analyse critique de celles-ci.

Ce travail de récit peut (doit ?) être travaillé avec un tuteur ou un pair. Il peut être intéressant d’identifier les compétences mises en œuvre.

2 – Le Journal de bord

Ce journal de bord informe du quotidien de son auteur, de façon chronologique et structurée. Il informe de la continuité des apprentissages, la façon dont ils évoluent, les écueils auquel l’auteur est confronté, les problématiques à résoudre, etc.

Ce journal est à priori personnel, sauf si l’auteur souhaite le partager (en totalité ou partiellement).

Partant du postulat que l’apprentissage s’appuie sur l’action vécue, Pascal Galvini propose le journal des Kairos, une stratégie en trois temporalités :

  • Un journal personnel, où l’on note les éléments marquants de la journée : ce qui s’est passé, ce qui s’est dit, comment je l’ai vécu, … Cela peut se faire sur un temps très court (5′ par jour, par exemple). On peut se limiter à quelques entrées simples : le geste pertinent, un moment de compréhension, un moment de bonheur.
  • La note réflexive (30 à 45 minutes toutes les 2 semaines) où l’on relit les situations relatées pour noter toutes les idées qui viennent : des questions, des réflexions, des constats. Elle peut intégrer un extrait du journal.
  • Ces notes réflexives sont synthétisées dans un rapport final, qu’il réponde à une attente institutionnelle (rapport de stage ou rapport d’activité ou personnelle (rapport annuel).

3 – Le document produit par l’apprenant

Cela peut être un article, une présentation, une vidéo, sur un sujet donné. Il peut, par exemple, s’insérer ou découler d’un projet ou illustrer la maîtrise d’un geste technique. On peut lui associer des éléments de contexte : analyse réflexive, réactions, questions soulevées, commentaires, …

4 – Compte rendu d’une réunion professionnelle ou d’une formation

Il doit être contextualisé, réflexif et peut déboucher sur des pistes d’améliorations ou stratégies pour l’avenir.

5 – Résumé d’article commenté et critiqué

Bon nombres d’articles scientifiques s’appuient sur des situations professionnelles, les analysent et proposent des éclairages intéressants. L’apprenant peut en faire un résumé rapide en présentant les apports, les limites identifiées et comment cela peut faire évoluer sa pratique professionnelle.

6 – Et mes usages à moi ?

Toutes ces pistes sont intéressantes. J’ai personnellement beaucoup plus investi les 4 dernières en animant ce blog qui est mon portfolio d’apprentissage. Il me semble aussi très riche de capitaliser les réactions de l’entourage (ou des lecteurs) qui sont stimulantes et ouvrent vers des perspectives parfois inattendues.

J’aimerais bien essayer le journal des Kairos, parce que cela me semble assurément très riche, mais la bonne excuse du temps contraint me désarme… Et vous, quelles sont vos traces d’apprentissages ? Comment vous organisez-vous concrètement pour progresser ?

Présenter l’envers du décor d’une formation

Nous proposons une nouvelle itération de notre formation de formateurs-concepteurs à distance (une analyse des versions précédentes est accessible ici). Cette année, nous avons décidé de présenter « l’envers du décor » pour chaque élément qui nous paraissait le mériter. Nous y présentons à chaque fois l’intention des formateurs, l’outil utilisé et l’engagement prévu du participant. Voici donc l’envers du décor de l’envers du décor…

L’intention des formateurs

Il nous a semblé intéressant de vous proposer le point de vue du formateur et les choix posés durant la conception de ce parcours. L’idée est d’expliciter le cheminement des formateurs selon 3 directions :

  1. L’intention des formateurs, pour vous présenter nos attentes (ou espérances) et la justification de chaque élément proposé ;
  2. L’outil utilisé, pour aborder les choix techniques faits, les astuces, et parfois les alternatives possibles ;
  3. L’engagement des participants, en s’appuyant sur le travail de Michelene Chi (présenté ici) qui propose un modèle à 4 niveaux : réceptif, actif, créatif et interactif. La recherche dit que la profondeur d’apprentissage est corrélée au niveau d’engagement des participants. Ces niveaux d’engagement sont souvent mis en balance avec l’exposition des participants et l’équilibre n’est jamais simple à trouver !

Ces différentes pages sont à priori cachées mais accessibles à tout moment, dès que vous le souhaitez. Il nous semble cependant pertinent que vous n’y accédiez qu’une fois que vous avez réalisé, ou au moins analysé, les activités exposées.

Voici les différents éléments analysés dans les différents modules :

Accueil

  • Les pages d’accueil ;
  • Faisons le point sur vos attentes et votre expérience de la formation à distance ;
  • Votre état d’esprit en 3 mots.

Module 1

  • Les ressources à disposition ;
  • Comparer deux scénarios ;

Module 2

  • L’auto-positionnement de chaque module ;
  • L’activité du formateur ;
  • L’analyse de ce parcours de formation.

Module 3

  • Les classes virtuelles ;
  • Les gazettes ;
  • La CV ça change, mais ça change quoi ?

Les activités clés

  • Pourquoi proposer des badges ?
  • Proposer une évaluation des compétences développées tout au long de cette formation
  • L’activité « votre parcours d’apprentissage

L’outil utilisé

Ces ressources sont présentées dans des sections (ie. pages du menu) spécifiques. Elles ne sont accessibles que si vous cochez un « marqueur d’achèvement » qui permet de gérer des restrictions de visibilité. Ainsi, sur la même page vous avez des éléments visibles uniquement si le marqueur est activé (les éléments présentés dans l’envers du décor) et d’autres éléments visibles uniquement si le marqueur n’est pas activé (un court texte de présentation).

Le niveau d’engagement des participants

Ces sections peuvent être consultées en toute autonomie, autant de fois que nécessaire, indépendamment du rythme de la formation. Le participant est autonome et responsable face à cette proposition. Il peut être dans une attitude réceptive (s’il se limite à une consultation) ou active (s’il prend des notes ou les résume). Il peut aussi être dans une attitude créative s’il teste les propositions dans le bac à sable, voire interactive s’il échange avec des pairs à ce sujet …

Si vous voulez en savoir plus …

Cette formation est présentée ci-dessous en vidéo.

Présentation de la formation de formateurs concepteurs à distance

N’hésitez pas à utiliser les commentaires pour poser vos questions ou partager vos réactions !

Choisir une activité pour une formation accompagnée

Vous devez mettre en place une formation hybride ou totalement à distance et vous ne savez pas trop quelles activités choisir. Voici quelques pistes et réflexions en fonction des objectifs que vous poursuivez.

Remarque : cet article est à l’origine une entrée du wiki m@gistère, cela explique que nombres de liens pointent vers cet espace.

1 – Donner du rythme à votre formation

Cela s’obtient avec des rendez-vous réguliers et deux pistes sont à envisager

a) Les rencontres synchrones

Vous pouvez envisager cela entre 1 fois par semaine et 1 fois par quinzaine. Ces rencontres synchrones sont des temps très attractifs et stimulants pour les participants, à condition d’être animées et scénarisées. Elles peuvent être utiles pour donner du rythme en proposant :

  • Une synthèse des activités passées,
  • Le lancement des activités à venir,
  • Des temps de travail en groupe,
  • L’intervention d’un ‘spécialiste’ pour apporter du contenu ou d’un témoin pour un retour d’expérience.

Il faut s’assurer que les participants peuvent se libérer :

  • Informer des dates et horaires bien à l’avance,
  • Ne pas toujours placer ces rencontres sur les mêmes plages horaires pour ne pas pénaliser toujours les mêmes classes (spécifique 2D),
  • Envoyer des ordres de missions aux participants pour qu’ils puissent se libérer.

Trois outils sont envisageables pour mettre en place ces rencontres synchrones :

  • BBB : outil adapté pour des temps plutôt ‘magistraux’
  • VIA : outil adapté pour des temps interactifs (avec les sondages, le tableau blanc collaboratif et les ateliers). On peut aussi utiliser VIA pour des temps ‘magistraux’
  • Chat : utile pour créer des temps d’échanges à plusieurs. Il faut un animateur-régulateur pour poser des questions et réguler les échanges.

b) Le forum des annonces

Un forum peut être efficace pour donner du rythme à une formation. Pour cela, il faut planifier les besoins de communication pour que les messages partent toujours les mêmes jours. On peut prévoir 1 ou 2 messages par semaine, (si vous voulez une base de 2 messages par semaine, vous pouvez, par exemple les envoyer le lundi et le jeudi). Cela nécessite de prévoir un tableau partagé entre les différents formateurs pour noter toutes les informations à transmettre dans chaque message. Ce tableau peut être très simple et regrouper la date de publication, le contenu à proposer et le responsable de ce message. Cette planification collective permet de faciliter le travail d’accompagnement et de créer un ‘rendez-vous’ régulier avec la formation.

Quelques conseils :

  • Un message par semaine peut être un bon compromis entre la quantité d’informations à transmettre et l’avalanche de messages reçus par les participants.
  • N’hésitez pas à varier les modalités de communication : vous pouvez très bien ne pas vous limiter à du texte et envoyer un message audio ou vidéo. Voici par exemple une série de gazettes vidéos pour une formation de formateurs

2 – Les différentes activités que vous pouvez proposer dans votre parcours

a) Apporter des notions ou des connaissances

il est souvent utile de proposer quelques ressources dans votre parcours pour apporter du contenu. Ces ressources doivent être choisies et en nombre limité pour ne proposer que ce qui est juste utile. Ce n’est pas au participant de faire le tri mais à vous de lui faciliter le travail en limitant la sélection des ressources aux ‘essentielles’. Il est préférable que chaque nouvelle ressource soit présentée : quel est son contenu, combien de temps faut-il y consacrer, quelle ‘pertinence’ par rapport aux objectifs de la formation.

Pour aider les participants à identifier et s’approprier les points essentiels du contenu présenté, il est pertinent de mettre en place un questionnaire de compréhension et/ou mémorisation.

b) Questionner les participants

Le questionnement individuel

Si vous souhaitez mettre en place un questionnement ‘simple’ pour une mise en application directe d’une notion ou une aide à la mémorisation, cela ne suscite pas d’interactions entre participants,. L’activité doit alors être courte et peut prendre des formes variées. Vous pouvez utiliser les outils suivants :

Le questionnement collectif

Vous pouvez aussi envisager de proposer des questionnements sur des pratiques, des retours d’expériences, des représentations. Dans ce cas, il est intéressant que cela se vive comme une discussion de groupe. Les outils suivants sont alors utilisables :

Le questionnaire qui permet de voir les réponses des autres après avoir répondu mais ne permet pas de réagir. Il peut être anonyme.

Le forum qui permet de voir les réponses des autres soit à priori, soit après avoir répondu, selon la configuration. Il ne peut pas être anonyme mais permet toujours de répondre aux contributions des uns et des autres.

c) Capitaliser des contributions

Il est souvent tentant de vouloir capitaliser des contributions de participants pour les mutualiser. Plusieurs outils sont à votre disposition suivant l’exploitation que vous souhaitez en faire :

  • L’atelier : pour organiser une lecture croisée entre pairs
  • La base de données : pour capitaliser et les contributions et faciliter la recherche selon des critères prédéfinis
  • Le dossier partagé : pour mettre dans un ‘pot commun’
  • La contribution (appelée devoir, sous moodle): où seuls les formateurs voient les documents déposés

Point de vigilance sur l’engagement des participants

Il est important de garder en tête que plus ce que vous demandez est personnel (scénario pédagogique, séquence, …), plus cela expose le participant et moins vous risquez d’avoir de retours. Ainsi, il est souvent plus efficace de demander aux participants de partager une ressource qu’ils ont trouvée sur internet plutôt qu’une ressource qu’ils auraient construite, ou de réagir à une ressource proposée (à travers un forum). Dans ce dernier cas, l’analyse d’une production externe permet, en miroir, de réfléchir sur sa pratique professionnelle

L’atelier, une activité très pertinente

L’atelier est une activité qui se déroule en deux temps :

  1. une capitalisation des contributions
  2. une lecture croisée

Le temps de lecture croisée permet à chaque participant d’accéder à plusieurs ressources partagées par les pairs, de les analyser et d’inciter à réfléchir sur ses pratiques. De plus, ceux qui ont partagé leur contribution reçoivent des rétroactions qui peuvent être très riches.

d) Produire à plusieurs

Il est compliqué de produire collectivement totalement à distance quand on ne connaît pas bien les autres participants. Cependant, dans le cadre d’une communauté de pratique ou d’apprentissage, où le parcours est jalonné de rencontres (par exemple si vous animez une constellation), m@gistère peut vous aider à produire à plusieurs. Voici des outils qui pourront alors vous être utiles :

  • VIA ou BBB pour mettre en place un temps de rencontre et d’échange synchrone à distance
  • Etherpad (genre de bloc note collaboratif) pour prendre des notes et structurer un document commun
  • Document collaboratif (basé sur Collabora, suite office en ligne) pour finaliser la mise en forme du document
  • Sticky notes pour recenser les idées, les points à aborder, …

3 – Et si la formation se déroule en autonomie ?

Courez lire l’article précédent qui traite de ce sujet … 😉

Concevoir une ‘auto-formation’ : choisir une activité

Vous devez mettre en place une auto-formation et vous ne savez pas trop quelle activité choisir. Voici quelques pistes pour soutenir votre réflexion.

1 – Les spécificités du contexte

La caractéristique des formations en libre accès est que les participants s’inscrivent à leur guise. Si vous n’envisagez pas un fonctionnement en cohorte (genre MOOC), il n’est donc pas envisageable de prévoir un accompagnement par une équipe de tuteurs. Les activités proposées doivent donc toutes être auto-suffisantes. Nous envisagerons ici deux types d’activités :

  • Les activités contributives qui permettent une consolidation de connaissance en mutualisant les contributions des différents participants
  • Les activités autonomes qui n’induisent pas d’interaction avec les autres participants

Remarque : cet article est à l’origine une entrée du wiki m@gistère, cela explique que nombres de liens pointent vers cet espace.

2 – Les activités contributives

On entend par activité contributives les activités où la contribution (ou la réponse) d’un participant vient enrichir la base des contributions déjà existantes dans une logique de capitalisation. Ces réponses des autres participants peuvent (ou pas, selon l’activité) n’être visibles qu’une fois que le participant a lui-même contribué. Dans cette logique, on ne fournit pas au participant une correction ou une bonne réponse mais plutôt l’ensemble des contributions apportées par la communauté. Libre au participant de se faire ensuite son avis sur les contributions les plus pertinentes.

Si vous utilisez une plateforme moodle, on peut classer dans cette catégorie les activités suivantes :

3 – Les activités autonomes

On entend comme activité autonome les activités où le participant qui réalise l’activité n’a aucune interaction avec les autres participants et n’a pas accès à leurs réponses. Dans cette logique, vous devrez proposer une correction ou des éléments de bonne réponse pour fournir une rétroaction aux participants.

Toujours sur une plateforme moodle, les activités suivantes sont dans cette logique :

4 – Les activités à bannir

Dans un parcours en libre accès, les activités synchrones ou ayant des contraintes temporelles sont à bannir car on ne peut pas gérer la temporalité des participants qui s’auto-inscrivent.

Ainsi, les activités suivantes doivent pas être utilisées dans un parcours en libre accès :

Par contre, l’enregistrement de tels temps synchrones (réalisés dans d’autres contextes) peut être une ressource utile.

Nous verrons dans un prochain article le choix d’activités pour une formation accompagnée.

Prodagéo… 15 ans déjà !

Un ami m’a sollicité pour présenter mon parcours de blogueur à des responsables de formation. Plutôt que de vous partager la présentation de 30′, je vous propose un pecha-kucha… Ça oblige à être synthétique…

Si vous êtes intéressé par les contenus présentés, suiviez les liens :

N’hésitez pas à réagir ou à partager votre expérience, les commentaires vous sont ouverts …

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